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Comptes rendus

Donato Giannotti, Della Repubblica fiorentina

Édité par Théa Stella Picquet, Rome, Aracne, 2011
Lucien Faggion
Théa Picquet
p. 549-551
Référence(s) :

Donato Giannotti, Della Repubblica fiorentina, édité par Théa Stella Picquet, Rome, Aracne, 2011, 264 p.

Texte intégral

1Précédée d’une introduction historique riche et détaillée, consacrée à l’Italie au temps de la Renaissance (pp. I-LVI), l’édition du traité du Florentin Donato Giannotti (1492-1573), intitulé Della Repubblica fiorentina, composé de quatre livres, est proposée par Théa Stella Picquet. Un texte d’une valeur inestimable fondé sur le manuscrit autographe (le codex 230, Magliabechiano, classe XXX), qui constitue la dernière volonté de l’auteur florentin, un anti-médicéen déclaré qui passa la plus grande partie de son existence à Rome, auprès de ses protecteurs, d’abord le cardinal florentin Niccolò Ridolfi puis, à la mort de celui-ci en février 1550, François de Tournon, également cardinal. La première mouture du traité fut achevée en janvier 1531, mais Giannotti continua de le revoir, de l’amender et de l’augmenter jusqu’à son décès, survenu en 1573, même si le texte a connu ses principaux remaniements entre le 14 janvier 1531 et le 14 novembre 1534, période au cours de laquelle il persiste à croire à la restauration des institutions républicaines à Florence ; puis, en 1538, année au cours de laquelle il procède à un profond changement structurel de l’ouvrage, qui correspond à son entrée au service du cardinal Niccolò Ridolfi à Rome. Aussi le manuscrit initialement conçu perd-il son caractère instrumental et devient-il un simple témoignage de ses convictions politiques.

2L’intérêt du texte mérite d’être remis en lumière. Il s’agit, pour Donato Giannotti, de s’interroger sur le meilleur régime politique possible et de résoudre la crise florentine, une réflexion et une proposition de solutions tenues pour nécessaires au bon fonctionnement des affaires publiques citadines, alors que Florence avait traversé des changements de régime politique incessants entre 1494 et 1527, et avait perdu, en 1530, ses valeurs républicaines pour adopter celles du principat, sous la domination d’une famille, les Médicis. Aussi ne manque-t-il pas, dans son traité, de se fonder sur les auteurs de l’Antiquité gréco-latine (Aristote, Polybe, Cicéron, Tite-Live) pour souligner ce qui constitue le meilleur type de gouvernement pour les Florentins : le régime mixte qui allie les notions de démocratie, d’aristocratie et de monarchie, selon une conception aristotélicienne, dans laquelle les magistratures parviennent à trouver un équilibre politique et social bénéfique, grâce à la présence de groupes sociaux intermédiaires qui se situent entre les grands et le peuple.

3Issu d’un milieu modeste, Giannotti put bénéficier d’une solide formation humaniste, profitant des enseignements de Marcello Adriani (pour le grec) et de Francesco Cattani da Diacceto (pour la philosophie), ce qui permit à l’auteur de fréquenter des membres de l’aristocratie florentine, tels Alessandro dei Pazzi qu’il suivit en 1527 à Venise et Piero Vettori, illustre philologue à l’époque, et de se lier d’amitié avec eux. À l’instar de Bartolomeo Calvacanti, Donato Giannotti fut un tenace adversaire des Médicis jusqu’à sa mort survenue en 1573. Figurant comme l’un des principaux théoriciens de l’État républicain à Florence, il ne manqua jamais, de 1530 à 1550, de réclamer la mise en place du meilleur système de gouvernement et, ainsi, la possible création d’une constitution républicaine pour sa ville natale. Nommé lecteur de poésie et de lettres grecques à l’Université de Pise en juin 1521, il séjourna ensuite à Padoue et à Venise en 1525 et 1527. C’est du reste dès 1527 que l’auteur florentin fut impliqué dans la vie de la République de Florence en qualité de secrétaire du conseil des Dix, à l’instar de Machiavel jadis, mais il ne fut pas un protagoniste de la vie politique citadine. Une fois les Médicis de retour à Florence de façon définitive, Donato Giannotti vit ses possibilités de carrière anéanties par les purges opérées par cette puissante famille. Il fut même emprisonné le 17 octobre 1530 et soumis à la torture, mais les résultats furent vains, car il ne fut jugé coupable pour aucun chef d’accusation. Quoiqu’il fût libéré, il fut contraint à l’exil pour une durée de trois ans dans l’arrière-pays de Florence, mais il préféra quitter la Toscane. Giannotti paya ainsi cher la fonction de conseiller qu’il assuma entre 1527 et 1530, dernière période de liberté républicaine où la cité de l’Arno fut mise sous la protection du Christ, alors qu’il s’était engagé dans les affaires citadines, en se distinguant comme un fin connaisseur des institutions vénitiennes et comme un brillant auteur de traités sur les réformes de nature institutionnelle.

4C’est ainsi que la précieuse édition présentée par Théa Stella Picquet contribue à rappeler le rôle essentiel joué par Donato Giannotti dans le cadre des idées politiques au XVIe siècle, à côté de ses compatriotes Machiavel et Guichardin, dans un espace – celui de Florence – qui ne cessa de connaître des bouleversements politiques profonds jusqu’à la disparition de la République en 1530, après une trentaine d’années d’incertitudes, souvent liées au contexte des guerres d’Italie et à l’émergence de puissances européennes qui s’opposèrent dans la péninsule (la France des Valois et les Habsbourg), au détriment de la souveraineté de la plupart des États italiens. Brillant humaniste, Giannotti fut un défenseur convaincu et honnête des valeurs républicaines, ainsi qu’un fervent admirateur de la République de Venise, véritable modèle pour une possible (re)-mise en place, à Florence, du régime politique idéal, mixte, partagé entre plusieurs groupes sociaux. Ce traité contribue à rappeler la résistance politique et « idéologique » qui a été exprimée, au risque d’une carrière brisée, aux puissants Médicis qui accédèrent au pouvoir en devenant duc, puis grand-duc de Toscane jusqu’en 1737.

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Pour citer cet article

Référence papier

Lucien Faggion, « Donato Giannotti, Della Repubblica fiorentina »Cahiers d’études romanes, 27 | 2013, 549-551.

Référence électronique

Lucien Faggion, « Donato Giannotti, Della Repubblica fiorentina »Cahiers d’études romanes [En ligne], 27 | 2013, mis en ligne le 25 juin 2014, consulté le 19 avril 2024. URL : http://journals.openedition.org/etudesromanes/4253 ; DOI : https://doi.org/10.4000/etudesromanes.4253

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Droits d’auteur

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